Chidori K. illustrations

Les coulisses

  • Au commencement était le taille-crayon

    Ou comment, mine de rien, les outils à affuter les crayons se taillent une place essentielle parmi les accessoires indispensables d’un illustrateur.

    En effet, à l’origine de toute œuvre picturale, se trouve l’esquisse ou le crayonné détaillé. Or pour que le trait soit précis, le crayon doit présenter une mine suffisamment pointue.

    2 taille-crayons. celui de droite est en métal, Celui de gauche est double et à réservoir.
    2 taille-crayons classiques

    J’ai commencé par utiliser des taille-crayons « classiques », présents dans la trousse de chaque écolier.

    Des indémodables. Le premier est le taille-crayon simple en métal, basique voire minimaliste mais peu encombrant, efficace et quasi-increvable.

    Le second, plus sophistiqué, s’avère très rapidement pratique. Doté d’un réservoir, il permet de résoudre le problème de ne savoir quoi faire des copeaux et des particules de mines produits lors de la taille en l’absence de poubelle à proximité immédiate.

    Si en plus l’objet présente deux embouts, comme celui figurant sur la photographie ci-dessus, des crayons à plus large diamètre peuvent être pris en charge, ce qui peut être appréciable.

    Cependant, je me suis trouvée souvent dans le cas de figure où la mine était taillée au maximum, et pourtant elle n’était pas assez pointue ou fine pour l’usage que j’aurais souhaité en avoir.

    Je me suis alors tournée vers le cutter, l’ami de tout mangaka pratiquant la pose de trames, pour obtenir la mine plus fine dont j’avais besoin. Je me sentais au départ un peu comme Rahan avec son fidèle coutelas, mais par la suite j’ai appris que c’était une pratique courante parmi les artistes les plus exigeants !

    Par ailleurs, pour le même usage, j’ai découvert un mini taille-crayon, dans lequel on ne peut insérer que la pointe du crayon. Je suppose qu’au départ il a été conçu pour les utilisateurs de porte-mines. J’ai vraiment été intriguée la première fois que j’en ai vu un dans une papeterie japonaise. Je l’avais acheté sans être trop sûre d’en avoir vraiment l’usage. Désormais je l’utilise en complément, comme le cutter, pour affiner une mine taillée pas assez bien aiguisée.

    Mini taille-crayon dans lequel est inséré un crayon graphite. Seule la mine entre dans le taille-crayon.
    Mini taille-crayon et mon crayon graphite favori. Seule la mine entre dans le taille-crayon.

    Enfin, dans la dernière catégorie de ma collection de taille-crayons figurent ceux qui sont réglables. Du matériel de précision. Enfin, théoriquement. Je viens d’acquérir le Dahle 133 dont j’avais entendu dire le plus grand bien, et j’avoue que je suis très déçue.

    Taille crayon avec réservoir, environ 9 x 7 cm. Manivelle au dos que l'on ne voit pas. Crayons de couleur posés devant et derrière le taille-crayon
    Le Dahle 133, taille-crayon à manivelle et à réservoir.

    Il s’adapte au diamètre du crayon et c’est une bonne chose, mais le réglage de la finesse de la mine ne permet pas d’obtenir de très bons résultats. Je me demande si je n’ai pas acheté un exemplaire défectueux ou si ce sont bien ses performances attendues. Dans ce cas, je ne comprends pas tous les éloges à son sujet.

    Par contre, rien de tel à reprocher au T’Gaal, mon petit chouchou, l’outil que je préfère, vraiment efficace, normal il est Japonais ! De la marque Kutsuwa, disponible en plusieurs couleurs, il présente un petit réservoir, il est réglable concernant l’angle de la taille et donc la finesse de la mine souhaitée, il est parfait.

    Taille crayon en plastique rose, T'Gaal écrit sur l'objet. Une molette est graduée de 1 à 5. Un crayon graphite Faber Castell à la mine très bien taillée est posé à côté.
    Mon précieux !!!
    Le taille-crayon T’Gaal en version rose et un crayon magnifiquement bien taillé à côté !

    Seul bémol : je l’utilise tellement souvent pour avoir toujours des mines parfaitement pointues que je finis par l’user et un remplacement devient nécessaire au bout d’un certain temps, à peu près un an. Il continue cependant à très bien fonctionner pour un usage courant, mais pour avoir des mines presque aussi pointues qu’une aiguille, il vaut mieux le changer.

  • Les feutres à alcool, un outil magique

    Comment suis-je tombée dans les feutres à alcool ? Comment tout cela a-t-il commencé ? Je ne sais plus vraiment mais aujourd’hui, il s’agit très certainement de mes outils favoris.

    Si vous connaissez probablement les feutres dits « classiques », à eau, peut-être ne connaissez-vous pas les feutres à alcool. La particularité de ces feutres consiste en le fait qu’il est très facile, en les maniant, de ne laisser aucune trace de marque de passage de la pointe lors de la réalisation d’aplats.

    C’est la première chose que l’on constate lorsque on en prend un en main et que l’on commence à essayer la couleur sur un papier. On gribouille et ooooh, pas de marques de traits, juste une belle surface colorée unie !

    Mais c’est loin d’être la seule qualité de ces prodigieux accessoires.

    Leurs deux autres avantages remarquables qui se découvrent rapidement sont les possibilités de dégradés et les mélanges de couleurs.

    Avec ces feutres il s’avère aisé de fondre les couleurs entre elles, les résultats sont impressionnants, même pour le débutant.

    À gauche, des feutres tels que ceux que nous avons tous eu en main, enfants. À droite des feutres à alcool. En l’occurrence, ici ce sont des Copics, la rolls des feutres. La tentative de dégradé aux feutres « classiques » par rapport au dégradé Copics était presque complètement déloyale dès le départ.

    Aussi, l’utilisateur avancé peut travailler son dessin en superposant de nombreuses couches jusqu’à l’obtention de la nuance de teinte, intensité et valeur souhaitées.  En outre, différents effets apparaissent à sa portée, que cela soit de la création de rendus proches de l’aquarelle à la restitution de textures et de matières bluffantes, le feutre à alcool offre de multiples possibilités.

    Sentiment de plénitude, de bien-être et d'harmonie, représenté par une jeune femme en position du lotus, les yeux fermés, qui médite, sereine, ses très longs cheveux châtains qui dessinent des arabesques autour d'elle et englobent 7 boules de cristal colorées. Chaque boule est d'une couleur différente représentant un chakra différent. Yoga, énergie positive, puissance de l'esprit.
    Illustration réalisée aux feutres à alcools.

    Je pourrais vous parler longuement du plaisir de mettre en couleur un dessin avec de tels outils qui s’apparentent parfois à des baguettes magiques ! C’est d’ailleurs ce que je vais faire dans un prochain autre article dédié à ces feutres.

  • Secrets de fabrication de mangas, n°1 : les outils indispensables

    Avide d’apprendre les techniques des auteurs japonais, j’ai rapidement découvert qu’un matériel spécifique était utilisé par la majorité de mes artistes favoris. Bien sûr, il est toujours possible de réaliser de superbes planches au stylo bille sur du papier imprimante, mais j’ai assez tôt trouvé très stimulant de manipuler les mêmes outils que les mangakas qui travaillent de manière traditionnelle.

    Concernant le papier, le format s’avère particulier certes, mais rien de trop déroutant. Plumes et encre, bon, ces outils apparaissent classiques même si leur maniement est loin d’être aisé pour ceux qui n’ont pas appris à faire des pleins et des déliés sur les bancs de l’école. Mais la technique de mangaka la plus surprenante qui m’ait été révélée est… l’utilisation de trames ! Késako les trames ? À quoi ça ressemble, à quoi ça sert ? Vous saurez tout à la fin de cet article.

    • Papier réglé japonais, format B4

    Tout d’abord le papier. En France, les formats les plus courants sont A4, A3, etc, mais il existe également la série B, moins connue… Quant au format raisin et ses déclinaisons, il s’agit d’un format typiquement français, alors que  les séries A et B correspondent à des normes internationales. 

    Si le format couramment utilisé par les mangaka pour dessiner des planches est le format B4, après des arrachages de cheveux, j’ai réalisé qu’il s’agissait en fait d’un JB, un B spécifique au Japon, légèrement différent du B international.  Quoi qu’il en soit, cela consiste en une taille comprise entre le A4 et le A3, avec un rapport différent. 

    Plus encore que le format, la particularité du papier pour auteurs de manga est de présenter différentes règles et repères en bleu inactinique (bleu pâle n’apparaissant pas à l’impression). Ces marques s’avèrent autant de précieuses indications à la fois pour prendre correctement en compte les fonds perdus et aussi pour tracer plus facilement les cases. 

    • Crayon papier

    D’aucuns vous diront préférer le crayon bleu, qui présente les mêmes caractéristiques que les marges du papier. Avec le crayon bleu, les traits disparaissent sans gommage, à la photocopieuse et au scanner. Un excellent article vous révèle tous les secrets du bleu inactinique et la manière de le rendre invisible en le scannant. Cependant, probablement par habitude, je préfère le simple crayon de papier. Il me sert depuis les premiers croquis préparatoires jusqu’à la planche finale.  

    • Plumes et encre

    J’utilise des plumes de la marque Deleter et Tachikawa, les maru-pen et les G-pen principalement.  

    Si vous en avez déjà utilisé, vous avez certainement remarqué que le dessin à la plume n’est pas très “intuitif”… On se rend vite compte par exemple qu’on ne peut pas “remonter” un trait avec une plume, il faut penser à tourner son papier pour être toujours dans le sens du dessin. Aussi, attention aux bavures et accidents de toutes sortes. 

    Malgré ces difficultés, le jeu en vaut cependant la chandelle car les variations d’épaisseur du trait obtenues à la plume confèrent au dessin un rendu inégalable.

    • Gommes de différentes qualités

    Le dessin au crayon de papier implique le gommage des premiers traits après l’encrage. Pour cet usage, une gomme assez douce est nécessaire, afin d’une part de ne pas abimer le papier et d’autre part ne pas effacer l’encre noire.  

    Quant au travail des trames, des gommes beaucoup plus dures se révèlent utiles. Les gommes sable notamment font très bien l’affaire.

    • Trames

    Les trames, c’est ce qui fait toute la différence entre la BD et le manga ! 

    Il en existe de toutes sortes, de la trame simple qui produit les nuances de gris, aux fleurs de sakura en passant par des motifs abstraits. On trouve même des décors complets, tels des salles de classes ou des paysages urbains. 

    Ces trames sont donc tout d’abord utilisées pour créer les niveaux de valeurs, c’est à dire tous les différents niveaux de gris qui apparaissent sur une planche. À la plume, le mangaka n’a que le noir et le blanc comme options. Certes, les hachures permettent d’obtenir un rendu de gris, mais demandent du temps à réaliser. Les trames ont ainsi été notamment conçues à l’origine afin de gagner du temps et permettre à l’auteur dont la série est au sommaire d’un magazine de prépublication de suivre le rythme et produire les vingt planches requises par semaine.  

    Ensuite, au fur et à mesure, des trames très variées sont apparues, représentant des textures, des motifs,  des objets, etc. Ainsi des cercles, des scintillements, des ombres, des fleurs, sont autant d’éléments dans la palette du mangaka qui peuvent lui permettre, par exemple, de créer des atmosphères, véhiculer des émotions.

    Voici pour les raisons de l’apparition et de l’utilisation des trames. Mais concrètement, comment se présentent elles ? En fait, elles ressemblent un peu à ces décalcomanies qu’on avait en cadeau dans les chewing-gums de notre enfance, ceux qui faisaient des bulles. Ce sont des feuilles transparentes et autocollantes que l’on découpe à son gré et que l’on applique sur son dessin pour l’habiller ou le compléter. Les trames unies ou dégradées sont composées de tout petits point noirs alignés, dont l’épaisseur et la densité varient. Elles peuvent être superposées ou gommées ou grattées, ceci afin de produire différents effets tels des reflets.

    Si le mode d’emploi n’est pas compliqué, l’application requièrt beaucoup de minutie et de soin. Pour la découpe, un cutter ou scalpel font aussi bien l’affaire. Je me satisfais d’un cutter très basique.  C’est lors de la manipulation des trames qu’il est important de veiller à ce que l’espace de travail soit propre et exempt de poussières (et poils de chats, par exemple).

    • Le lisseur 

    Chez Deleter, il s’appelle le Tone Hera, c’est en fait une sorte de spatule qu’on passe en appuyant sur la planche, une fois les trames posées définitivement pour permettre leur adhésion. 

    Ce n’est pas indispensable, à vrai dire, l’utilisation du dos d’une cuillère produit le même résultat, mais cet accessoire fait quand même plus classe.  

    • En plus, petit carnet à nemu 

    Pour terminer de se la jouer définitivement comme un vrai mangaka, on peut aussi faire l’acquisition d’un petit carnet dont les feuillets sont remplis de mini-pages réglées comme le papier pour dessiner ses planches. Il permet de faire son story-board, ou nemu en japonais, et d’avoir une vision globale de son histoire.